Solide sur ses bases à l’image d’un rapport moral voté à l’unanimité des 95 comités départementaux présents, l’Usep a précisé à Aix-les-Bains la façon dont ses associations s’engageront l’an prochain dans le projet « Les enfants font leurs jeux », jusqu’à l’objectif final de 2024 rencontres sportives scolaires organisées de début avril à fin juin. L’assemblée générale a aussi regardé plus loin et abordé de manière résolue, chiffres à l’appui, la question du coût de la part assurance des licences.

 

Message. Apres l’accueil de Renaud Beretti, maire d’Aix-les-Bains, et les interventions du président de l’Ufolep, Arnaud Jean, et de François Micheletti, inspecteur général de l’éducation, du sport et de la recherche, la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra, a insisté dans un message enregistré sur les efforts de l’Usep pour désamorcer la « bombe à retardement sanitaire » de la sédentarité et son rôle pivot dans la continuité du parcours sportif, illustré par les conventions qui la lient à 36 fédérations. La ministre a ensuite conclu sur l’objectif partagé de « féconder toute une génération pour que le sport devienne pour elle comme une seconde nature » et cité, sans les confondre, le sport scolaire Usep, les 30 minutes d’activités quotidienne à l’école et l’éducation physique et sportive.

Rapport moral. Dans son complément au rapport moral, Véronique Moreira a mis en perspective les différents enjeux de cette assemblée générale : transparence sur les questions d’assurance, modifications statutaires et mobilisation autour de la dynamique 2024, qui doit servir de vitrine à l’Usep et viser son développement.

Rapport d’activité. Pour sa première AG, le directeur national, Jérôme Vandernabeele, en poste depuis la rentrée dernière, a apporté le regard d’un ex-prof d’EPS qui apprend à connaître le sport scolaire du premier degré. Il a souligné la place « remarquable » occupée par l’Usep, 6e fédération française en termes de licenciés, surtout lorsque l’on compare ses moyens avec ceux dont bénéficie l’UNSS dans le second degré, « qui pour 1,5 fois plus de licenciés dispose d’un budget 25 fois supérieur ». Le directeur national appelle cependant à la « vigilance » concernant l’érosion des licenciés enfants et adultes, de l’ordre de 20 % sur les 8 dernières années. D’où sa volonté d’interroger l’impact des outils et des partenariats développés par l’Usep et d’améliorer sa « visibilité » et sa « notoriété », a-t-il insisté, avant d’inviter l’équipe de direction à le rejoindre afin que les comités mettent un visage sur tous leurs interlocuteurs nationaux, prêts à répondre à leurs questions et sollicitations.

Budget. Le rapport financier 2022 (présenté par la trésorière, Charlotte Carré) a été voté à l’unanimité. Détaillé par son adjointe, Jacqueline Morel, le budget 2023 (où la part des cotisations représente 47 % et celle des subventions 32 %) a été présenté à l’équilibre à hauteur de 5,37 millions d’euros et approuvé à 93,19 %.

Tarifs et assurance. La question du coût de l’assurance fut abordée lors du vote des tarifs d’adhésion 2023-2024, qu’elle détermine en partie. Laurent Muguet, secrétaire général adjoint de l’Usep, a alors ouvert ce qui était bien plus qu’une simple « parenthèse ». Il a tout d’abord rappelé ce qu’est l’Apac, service assurance commun à tous les secteurs de la Ligue de l’enseignement, y compris le secteur sportif composé de l’Usep et de l’Ufolep. Fin 2021, le souhait de l’Apac d’augmenter ses tarifs a ravivé à l’Usep et à l’Ufolep l’exigence de davantage de transparence sur les chiffres de la sinistralité. Ceux-ci furent longs à obtenir et ne l’ont été que grâce à la démarche volontariste de l’Ufolep, qui a lancé un appel à concurrence, et à la pugnacité de l’Usep. On le comprend, tant ils sont édifiants : en 8 ans, les cotisations collectées par les associations Usep à travers les licences enfants et adultes ont représenté plus de 8,8 millions d’euros (1,1 million par an) quand on enregistrait dans le même temps seulement 452 sinistres, pour un montant réglé de 64 000 euros (soit 56 sinistres et 8 000 euros d’indemnités par an). Pour cette année, l’Usep a obtenu le gel du coût de l’assurance, l’Apac ne répercutant pas l’augmentation des tarifs de la Maif. Mais des négociations vont s’engager pour l’avenir… Pour autant, l’Usep ne remet pas en cause le principe de mutualisation. Elle sait aussi qu’aucune fédération sportive, pas même une fédération scolaire accueillant de jeunes enfants et sans caractère compétitif, « n’est à l’abri d’un sinistre sérieux ». « Mais faire vivre la mutualisation, c’est observer trois principes, a rappelé Laurent Muguet : la transparence (et si on en prend le chemin on n’en est pas encore au bout) ; l’équité, afin de mieux répartir la charge ; et le consentement. »

Sidération et réactions en chaîne. Ces chiffres enfin rendus public ont sidéré l’assistance et « estomaqué » la représentante de l’Oise, tandis que l’Indre-et-Loire demandait s’il était possible de voter de manière séparée sur la part assurance de la licence (« non », a répondu le secrétaire général de l’Usep, Dominique Caron). « Ça fait un quart de siècle qu’on se pose ces questions ! », a fulminé la Loire-Atlantique. « Comment marquer pour l’avenir notre défiance envers l’Apac » s’est interrogée la Charente-Maritime, le Val-de-Marne envisageant pour sa part de s’abstenir de voter les tarifs. Saluant la démarche de l’Ufolep, plus avancée, les Pyrénées-Atlantiques ont suggéré de l’imiter en lançant un appel d’offre, et l’Eure-et-Loir proposé la rédaction d’une « motion ». Les tarifs 2023-2024 ont finalement été approuvés à 78,80 %.

Contribution pluriannuelle d’objectifs. Dans ce contexte, la question posée par le Pas-de-Calais était susceptible de mettre le feu aux poudres : « Une Ligue départementale peut-elle n’opérer aucun soutien financier à un comité Usep qui déclare ses actions dans le cadre de la contribution pluriannuelle d’objectifs (CPO) accordée par le ministère de l’Éducation nationale ? » Non, cela « n’est pas recevable » a répondu la présidente de l’Usep, Véronique Moreira, aussitôt confortée par la présidente de la Ligue de l’enseignement en personne. Replaçant ce contentieux dans le contexte financier très tendu de la Ligue 62, Françoise Sturbaut a expliqué qu’il faisait l’objet d’une médiation nationale et affiché sa volonté « que l’action de l’Usep soit reconnue, avec le financement correspondant ». Une prise de position dont le comité du Pas-de-Calais souhaite toutefois qu’elle s’accompagne d’une « clarification des flux financiers Usep-Ligue » et de l’édiction de « règles de bonne conduite dans la répartition de la CPO ».

Vote direct des associations. Après ces questions incontournables, et malgré les talents pédagogiques déployés par le secrétaire général de l’Usep, Dominique Caron, le vote des modifications statutaires et réglementaires rendues obligatoires par la loi sur le sport de 2022 a pris par moments des airs de pensum. De nombreux comités auraient préféré qu’en raison de sa spécificité scolaire, l’Usep en soit exemptée, tout comme son homologue du second degré : « l’UNSS est-elle une fédération sportive ? » a demandé benoîtement la Meuse. Mais, mauvaise grâce ou pas, les différentes dispositions ont été votées à plus de 90 %, qu’il s’agisse de la parité hommes-femmes dans les instances, de la rémunération de la présidence et de sa limitation à trois mandats, ou du vote direct des associations aux élections : la disposition qui précisément fait problème, sur le plan technique et surtout démocratique, si comme c’est probable les associations d’école se mobilisent peu pour une élection très éloignée de leurs préoccupations.

Dynamique 2024. Philippe Delamarre et Romain Zuliani, élus nationaux en charge de la dynamique 2024, ont explicité en tribune les caractéristiques « indispensables » que devront réunir les 2024 rencontres – voire beaucoup plus – qui accompagneront du 3 avril au 7 juillet la mobilisation des associations Usep autour des Jeux olympiques et paralympiques et la forme que prendre l’implication des enfants : « j’agis », « je comprends », « je débats ». En outre, chaque comité départemental avec les deux mascottes des JOP afin qu’elles puissent être un support de communication, tandis qu’un carnet de l’enfant réalisé avec pour partenaires les comités olympique et paralympique (CNOSF et CPSF) sera largement diffusé. Adrien Deprez, chef de projet éducation à Paris 2024, est ensuite intervenu pour souligner l’engagement de l’Usep dans la Semaine olympique et paralympique (partie prenante d’un millier des 3 500 actions recensées) avant d’être interpelé par la salle sur les « coupons » promis aux associations labélisées Génération 2024 pour solliciter des intervenants sportifs mais sérieusement revus à la baisse.

Nouvelles rencontres. Jacqueline Morel a présenté la rencontre « échecs » et la façon dont elle associe jeux autour des cases d’un échiquier et mise en activité physique. Le groupe de travail « breaking » animé par Sylvie Crusson-Pondeville a ensuite détaillé le contenu de la mallette pédagogique Break’school construite autour de cette nouvelle discipline olympique. Fruit de deux ans de travail, elle sera bientôt à la disposition des comités. D’ores et déjà, l’aperçu chorégraphique proposé sur scène par les auteures donne furieusement envie de s’en emparer !

Motion. Le dimanche matin, les élus nationaux ont répondu à une floppée de questions écrites déposées la veille par les comités, portant principalement sur les rapports Usep-Ligue, la répartition de la CPO et le coût de l’assurance. Le président de la l’Apac, Roger Évrard, a alors pris la parole et expliqué par deux sinistres graves et passés l’augmentation initialement envisagée, obtenant de courtois applaudissements. Une motion sur le sujet, proposée par le comité Centre-Val-de-Loire et reformulée par le comité directeur, a ensuite été mise au vote : « L’assemblée générale donne mandat au comité directeur national d’engager la négociation avec la Ligue et l’Apac pour obtenir le montant de cotisation le plus adapté à la sinistralité de l’Usep, dans le cadre d’une mutualisation raisonnée. » Elle a été approuvée à l’unanimité. Étienne Butzbach, vice-président de la Ligue de l’enseignement en charge de l’éducation, a soutenu cette initiative tout en invitant à « prendre garde aux tendances séparatistes » et en prenant la peine de réaffirmer que « l’Usep est au cœur du projet éducatif de la Ligue ». Cela n’a pas clôt immédiatement le débat, qui s’est poursuivi à travers des témoignages de terrain invitant à ce que les paroles se traduisent en actes.

Partenariat. Benjamin Huygue, interlocuteur de l’Usep chez Decapro (branche collectivités de Decathlon), a présenté dans un message vidéo l’esprit du partenariat en cours de développement. Puis Jérôme Vandenabeele en a précisé les premières réalisations (fiches jeux pour les 30 minutes d’activité physique quotidienne, valorisation de l’Usep dans un catalogue à destination des écoles, opérations promotionnelles) et esquissé les perspectives d’avenir.

Médailles d’honneur. Deux médailles d’honneur ont été décernées. La première à Annie Ramirez, ex-déléguée du Vaucluse et de la Drôme, formatrice nationale et membre du comité directeur, où elle exerça de 2016 à 2020 les fonctions de secrétaire générale chargée de la gouvernance. La seconde à Baptiste Marsault, délégué du Loir-et-Cher et très longtemps impliqué dans le groupe de travail national « métier de délégué », métier qui n’a plus de secret pour lui.

Conclusion. Après des interventions de David Lelong (SE-Unsa), Marie-Françoise Potereau (vice-présidente du CNOSF, en charge de la mixité et des JOP) et François Coux (directeur académique des services de l’Éducation nationale pour la Savoie, qui a invité les représentants des comités à « bousculer » ses collègues Dasen trop frileux à l’égard du sport scolaire), Véronique Moreira a résumé ce congrès 2023 (stage + AG) en trois mots : « olympique », « transparence » et « fédération », ce dernier terme pour souligner « l’unité » affichée par l’assemblée et la qualité du « débat démocratique ».

Il ne restait plus qu’à remercier le comité de Savoie pour son accueil chaleureux et particulièrement attentionné. Celui-ci a transmis le témoin à Tours et à l’Indre-et-Loire : rendez-vous donc en octobre 2024, avec pour étape intermédiaire un rassemblement des présidents et délégués et une AG financière en avril à Paris. Et bon retour à Brigitte Velard-Gentet, présidente de l’Usep Jura, qui d’ici-là entraînera peut-être d’autres adeptes des mobilités actives dans son sillage !

 

Un stage des dirigeants enthousiasmant sous le regard expert de Philippe Meirieu

L’assemblée générale d’Aix était précédée d’un stage des dirigeants de trois jours où les travaux en ateliers sur la « maternelle », la « rencontre sportive associative olympique » et le tronc commun autour de « l’évènement Unis’Vers 2024 » ont été éclairés par les interventions en plénière de Fabrice Delsahut, Maryse Chrétien et Stéphanie Barrau (sur les maternelles), et de Joseph Gandrieau (sur le concept de « littératie physique »). Ce stage auquel participait la présidente de l’Association nationale des conseillers pédagogiques, Hélène Cuilhé, a également été rehaussé par la présence de Philippe Meirieu. Celui-ci a interrogé la notion d’enfant « auteur » chère à l’Usep, avant de jouer son rôle de grand témoin en renvoyant un regard positif sur la formation en listant dix « contradictions et tensions structurantes » observées tout au long des ateliers : finalisation vs. formalisation, pédagogie de l’explicite/pédagogie de la découverte, compétition/coopération, organiser/lâcher prise… Une conclusion lumineuse et enthousiasmante, que Véronique Moreira compléta en rappelant la volonté de « permettre à l’enfant de passer du « faire«  à l’intention de « faire pour lui et les autres » » et la méthode choisie pour engager les animateurs Usep dans cette voie : favoriser « le pas de côté réflexif », utiliser « le jeu comme inducteur du travail de formation », mettre « l’altérité au service de la mutualisation » et faire vivre « l’intelligence collective ».