« Pourquoi l’école a-t-elle compté dans votre carrière sportive ? » C’est la question à laquelle l’ancien champion de biathlon a répondu lors d’une table ronde sur « Les enjeux du sport-santé » animée par la MGEN en ouverture du Salon de l’éducation 2022. Un débat1 auquel participait aussi la présidente de l’Usep, Véronique Moreira, interrogée pour sa part sur la fonction éducative du sport et la façon dont le sport scolaire participe au développement de l’enfant.
Sa première course, c’était avec ses copains et copines de l’école de Mont-Louis (Pyrénées-Orientales), un maillot Ufolep sur les épaules mais probablement sous l’égide de l’Usep. Martin Fourcade se souvient qu’il a terminé 3e et que c’est là que, pour lui, tout a commencé. « J’ai découvert le ski lors des journées ou demi-journées organisées par l’école » explique celui qui décrocha ensuite 5 titres olympiques et 13 de champions du monde. « J’ai bien conscience que l’environnement dans lequel j’ai grandi y est pour beaucoup, et que côté génétique aussi j’ai eu de la chance » a-t-il reconnu, avant de faire référence au « comportement », troisième facteur déterminant de la santé identifié par le Dr Roland Krzentowski. Interrogé sur la progression de la sédentarité dans la population, en particulier chez des enfants « accros » aux écrans, le praticien avait souligné un peu plus tôt qu’à la différence de l’hérédité et de l’environnement social ou géographique, c’est là un élément sur lequel chacun a prise. « D’où l’intérêt de prendre l’habitude de la pratique physique ou sportive dès l’enfance. Il est toujours plus facile de garder une habitude que d’en prendre une sur le tard. C’est pourquoi le sport à l’école est primordial, et j’ai eu cette chance-là », a expliqué le quintuple champion olympique.
Le sport scolaire pour donner le goût de la pratique physique
Encore faut-il faire preuve de pédagogie, comme l’a souligné la présidente de l’Usep, Véronique Moreira. « Cela ne sert à rien de dire à un enfant : « Fais du sport, c’est bon pour ta santé, tu en verras les bénéfices plus tard ». En revanche, on peut développer chez lui le goût de la pratique physique et sportive en jouant sur les trois leviers que sont le plaisir, la mise en réussite et la mise en situation de progrès. Cela lui permet de comprendre qu’il peut agir sur son corps et entretient sa motivation. »
Ce qui a changé depuis l’époque où Martin Fourcade était écolier, c’est que l’Usep a éliminé la compétition sous sa forme classique, afin de ne laisser aucun enfant en chemin : « La compétition est avec soi-même, dans le cas d’un contrat que l’enfant s’est fixé, et s’exprime aussi dans des défis collectifs que chacun contribue à relever. » Et tout en appuyant la généralisation des « 30 minutes d’activité physique quotidienne » dont, en ancien champion et citoyen engagé, Martin Fourcade a accepté de se faire le relais, Véronique Moreira a insisté sur sa nécessaire articulation avec l’EPS et le sport scolaire. Elle a aussi rappelé la proposition de l’Usep de créer une association sportive dans chaque école, avec un référent chargé de porter les projets sportifs et de faire le lien entre ces différents temps.
Un père attentif
L’école, Martin Fourcade y retourne aujourd’hui comme père de deux filles de 7 ans et 5 ans. Un père attentionné qui prend le temps de donner à sa progéniture le goût de l’activité physique : « Nous habitons à 1 km de l’école, et pour la majorité de nos voisins la facilité c’est d’amener les enfants en voiture. Nous, nous partons un quart d’heure plus tôt, à pied. Pareil le soir au retour. Il y a ensuite l’EPS et le sport à l’école, puis la pratique associative: du ski, parce qu’on ne se refait pas, mais aussi de la gymnastique et de la danse pour la plus jeune de mes filles, car c’est son choix. Et, à côté de ces activités que les enfants découvrent par eux-mêmes, il y a celles que l’on partage en famille. Peu m’importe que mes filles soient des compétitrices en ski. En revanche, je tiens à partager avec elles ces temps on l’on fait de l’activité sportive sans même en avoir l’impression. »
L’ancien champion est lui-même l’exemple vivant de la différence, mais aussi de la continuité qui peut exister entre sport de compétition et sport loisir. « Après avoir découvert le sport à l’école, puis avoir poussé le cursus de compétiteur le plus loin possible, j’ai aujourd’hui une pratique sportive riche et intense, mais différente. Depuis la fin de ma carrière en 2020, je n’ai pas enfilé un dossard. En revanche, je pratique avec mes enfants, ma femme, mes amis, et pour moi le sport est un lien social autant qu’un loisir. »
Et pourquoi pas, demain, revenir au sport scolaire ? Lui qui en sait déjà tout l’intérêt pour la santé et l’épanouissement des enfants…
(1) Arnaud Jean, président de l’Ufolep (ici au micro), et Stéphane Suzzoni, directeur général du centre de Mon Stade, centre d’expertise en santé, labélisé « Maison sport santé » ont également participé au débat.