Avec d’autres organisations, l’Usep s’était émue de la disparition envisagée de l’EPS au concours de recrutement des professeurs des écoles, dans le cadre de la réforme de leur formation : le ministère de l’Éducation nationale a annoncé le report d’un an du projet. « Ce délai supplémentaire doit être mis à profit pour redonner une place significative à la discipline dans la formation des enseignants », insiste la présidente de l’Usep, au nom de l’articulation entre EPS et sport scolaire.
Véronique Moreira, l’Usep se félicite du report d’un an de la réforme de la formation des enseignants du premier degré : quel était le problème ?
Ce qui est en cause, c’est la place accordée à l’éducation physique et sportive (EPS) dans la formation des futurs professeurs des écoles. Le groupe de travail chargé, au sein de l’Éducation nationale, de la réforme de leur formation, prévoyait de supprimer l’oral obligatoire d’EPS du concours de recrutement (CRPE). En tant que discipline, l’EPS aurait perdu de sa légitimité, et le sport scolaire avec elle, tant l’articulation est forte entre l’une et l’autre.
C’est si grave ?
À nos yeux, oui. Le ministre souhaite que la formation se recentre sur les enseignements fondamentaux : pour nous, l’EPS en fait partie. Pour qu’il s’épanouisse, il est fondamental que l’enfant soit à l’aise dans son corps et puisse développer des capacités physiques qui contribuent également à sa réussite scolaire. Supprimer l’épreuve d’EPS du concours dévaloriserait la discipline et enverrait le signal de son peu d’importance.
D’autres organisations ont-elles réagi ?
L’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGÉSR), le Syndicat national de l’éducation physique (Snep), l’Association des enseignants d’éducation physique et sportive (AEEPS), le Syndicat des enseignants (SE-Unsa)… Ce sont en effet des professeurs d’EPS qui forment leurs collègues du premier degré au sein des Instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation (Inspé). Mais l’association Egal sport a aussi rappelé que l’EPS permet de travailler sur l’égalité filles-garçons et de lutter contre les stéréotypes. L’Usep est très attachée au fait de former des citoyens, tout en apportant aux enfants une culture sportive, au sens d’habitudes de pratique. Cela ne s’apprend pas en regardant la télé !
Conserver l’oral d’EPS au concours de recrutement des professeurs des écoles ne résoudra pas la question de la formation…
Non, et c’est pourquoi nous souhaitons que ce report permette de mener une vraie réflexion sur la question. Comment imaginer faire respecter les 3 heures hebdomadaires d’EPS des programmes officiels sans que les enseignants soient suffisamment formés ? Ce n’est pas le cas aujourd’hui. Il y a une dizaine d’années, du temps de l’IUFM (Institut universitaire de formation des maîtres), durant leurs deux années de spécialisation après la licence, les étudiants bénéficiaient de 72 heures de formation en EPS. Aujourd’hui, ce n’est plus qu’une trentaine d’heures dans le meilleur des cas. À titre d’exemple, pour l’apprentissage de la natation, ils ne voient la plupart du temps que des vidéos, et à peine 3 heures de formation y sont consacrées ! L’Usep, qui organise des rencontres sportives, est bien placée pour le savoir : construire et animer une séance d’EPS pour sa classe ne s’improvise pas. Trop peu formés, les jeunes enseignants y renoncent, tout simplement. C’est pourquoi nous ne demandons pas seulement le maintien de l’oral d’EPS au concours : nous réclamons que l’EPS retrouve toute sa place dans la formation, et que celle-ci soit étalée dans le temps et déconnectée de la seule préparation du concours. Un enseignant qui maîtrise l’enseignement de l’EPS, et sait l’importance des activités physiques pour les enfants, sera alors enclin à s’investir dans le sport scolaire.