Lundi 10 septembre, deux classes Usep de Sartrouville (Yvelines) et Colombes (Hauts-de-Seine) ont assisté à l’entraînement public de l’équipe de France de rugby à leur camp de base de Rueil-Malmaison, en banlieue ouest de Paris. Récit d’une fin d’après-midi en bord de terrain.
16 h 30, stade du Parc, à Rueil-Malmaison. Sous le chaud soleil d’une canicule déclinante, les CM1 de l’école Pablo-Neruda de Sartrouville patientent depuis déjà une demi-heure quand, de l’autre côté du terrain synthétique, des clameurs saluent l’arrivée du XV de France. Des vivats auxquels, déjà concentrés sur leur entraînement, les joueurs s’interdisent pour l’instant de répondre.
Scolarugby
Tout comme leurs camarades de l’école Lazare-Carnot de Colombes, placés à l’autre extrémité du stade, les écoliers de Sartrouville ne sont pas là par hasard. La proximité est le premier critère : Sartrouville n’est qu’à 13 kilomètres de Rueil, même si en raison des multiples changements en transports en commun la mairie leur a accordé un car. Mais, surtout, la balle ovale commence à leur être familière : l’an passé, en CE2, ils ont joué les figurants lors d’un stage olympique rugby réunissant une vingtaine de professeurs des écoles de l’Usep, avant de participer à une rencontre Scolarugby.
Leur apprentissage se prolongera cette année avec leur enseignant de CM1, qui a un peu joué au rugby durant ses années d’étudiant en Staps. « Depuis vendredi, cette sortie est un sujet de discussion et les enfants relateront ce qu’ils auront vécu sur le blog de la classe, explique Ludovic Matichard. Aujourd’hui je leur ai aussi montré quelques vidéos du match d’ouverture contre la Nouvelle-Zélande, que plusieurs ont été autorisés à regarder, au moins en partie, et j’ai distribué un trombinoscope des joueurs. »
Commentaires de bord de touche
Amir, 9 ans, qui adore « courir vite avec le ballon », comme Thomas Ramos, mais apprécie un peu moins « les plaquages », observe avec circonspection la façon dont Willy Atonio et les autres avants s’emplafonnent de bon cœur dans les blocs de mousse que les joueurs positionnés en défense tiennent devant eux. Sa voisine Khadija, une basketteuse, confie pour sa part aimer beaucoup « se passer la balle et aplatir ». Un goût partagé par la frêle Aliyah, adepte du karaté, qui en revanche se distingue de ses camarades qui agitent l’un des petits drapeaux tricolores distribués à l’entrée en affirmant : « Je n’aime pas trop les Français, je préfère les All Blacks. »
Ce n’est pas le cas de Wissam, qui entame sa troisième saison de rugby en club et apprécie en connaisseur les lancers en touche et autres exercices techniques travaillés par ceux qu’il couve du regard. Il a vite identifié Antoine Dupont sous sa casquette mais s’interroge à haute voix sur l’identité des joueurs vêtus d’une chasuble orange. « Ce sont les Espoirs du stade Français, qui servent de partenaires d’entraînement au XV de France, en alternance avec ceux du Racing », explique alors un spectateur dans son dos. Jérôme Riondet, joueur du grand Racing des années 1980, reconverti journaliste pour World Rugby, fait volontiers profiter la jeune génération de son expertise : « Ils reproduisent le système de défense et les lancements de jeu des Uruguayens, en prévision du prochain match. ». C’est donc pour cela que, derrière ses lunettes futuristes, Fabien Galthié leur distille des indications sur leur placement…
Au tableau électronique, si le score demeure vierge 50 minutes se sont déjà écoulées. Exit alors les jeunes sparring-partners et les ateliers spécifiques aux avants et aux lignes arrière, et place aux oppositions à 15 contre 15. Tant mieux, car le spectacle se rapproche enfin de l’embut où sont positionnés les Usépiens de Sartrouville, qui retrouvent toute leur flamme et ne ménagement pas leurs encouragements.
Quand le jeu s’éloigne à nouveau, le passage du photographe attitré du XV de France offre une intéressante diversion : en plus, c’est un ami du maître ! Avec son maillot bleu frappé du coq, son accréditation et son objectif grand angle, Julien Poupart les impressionne tant qu’un élève lui demande un autographe. « Mais non, les stars ce sont les joueurs ! », s’amuse-t-il. Il n’empêche : demain, c’est bien lui qui prend avec eux le train pour Lille, lieu du match contre l’Uruguay.
Des autographes pour finir
18 h 30, fin de l’entraînement. Il est temps de s’esquiver : le chauffeur du car attend. « Aller, encore cinq minutes, décide finalement le directeur de l’école, Laurent Pélissier. Normalement, les joueurs vont venir signer des autographes. » En effet, deux gaillards encore tout suants s’avancent vers eux.
Les enfants les accueilleraient volontiers en les appelant par leur prénom mais, faute de les avoir identifiés dans l’instant, c’est en regardant sous quelle photo ils ont apposé leur signature que Zeyneb et Aliyah constatent qu’il s’agit de François Cros, 3e ligne du Stade Toulousain, et de Baptiste Couilloud, le demi de mêlée lyonnais. « Ça fait un peu bizarre de se dire que ce sont les mêmes qu’on voit à la télé », commente Madina, tandis que derrière la rambarde Zakaria crie une dernière fois « Penaud, Penaud ! », son joueur préféré. Pour la forme, car l’ailier et top scorer du XV de France n’est pas en vue. Or maintenant il est vraiment l’heure de rentrer, en se disant que même si c’était souvent d’un peu loin, tous ces futurs joueurs de légende, ils les ont vu pour de vrai.
Tonga, Pays-de-Galles, Italie, Géorgie, Écosse…
Ailleurs en France, en parallèle de l’opération Scolarugby, tout au long du mois de septembre des enfants de l’Usep ont été conviés sur les stades d’entraînement d’autres équipes engagées dans la Coupe du monde en France : les Tonga à Croissy sur-Seine et le Pays-de-Galles à Versailles (Yvelines), l’Italie à Bourgoin-Jallieu (Isère, mardi 12 septembre, ici en photo), la Géorgie à La Rochelle (Charente-Maritime) et l’Écosse à Nice (Alpes-Maritimes). À chaque fois, c’est le comité régional Usep qui a été chargé de répartir les places disponibles.