En quoi le label Génération 2024 peut-il contribuer au développement de l’Usep ? Et quel regard Thierry Terret, délégué ministériel aux Jeux olympiques et paralympiques et historien du sport, porte-t-il sur la fédération sportive scolaire de l’école publique ?
Thierry Terret, le cahier des charges du label Génération 2024 exige des écoles qu’elles possèdent une association sportive scolaire et respectent les horaires d’éducation physique et sportive. Sur ce second point notamment, n’est-ce pas reconnaitre la faillite de l’EPS à l’école ?
Vous avez raison. Dans la réécriture du cahier des charges – car nous en sommes à la seconde version – nous avons insisté d’une part sur le respect des textes officiels, d’autre part sur l’existence d’une association sportive au sein des écoles qui sollicitent le label, une association Usep en ce qui concerne l’école publique. Cela signifie que tout le monde n’en est pas là : les horaires officiels d’EPS ne sont pas appliqués par toutes les écoles, et il n’y a pas une association sportive dans chaque école.
C’est pourquoi le ministre souhaite mettre à profit l’année 2019 pour questionner la place de l’éducation physique et du sport scolaire dans le premier degré, et trouver des remédiations qui iront au-delà de l’Usep. Nous en sommes pour l’instant au diagnostic. L’un des enjeux des Jeux olympiques et paralympiques, c’est d’aller vers un respect total des textes et un accroissement du nombre d’associations sportives. Nous en discutons très régulièrement avec la présidente de l’Usep, Véronique Moreira.
Vous qui êtes historien du sport et ancien recteur d’académie, comment considérez-vous l’Usep ?
L’Usep possède une spécificité unique, qui la différencie de toutes les autres fédérations : elle est la fille de l’Ufolep et la petite-fille de la Ligue de l’enseignement. Autrement dit, elle porte en elle un projet éducatif dont elle constitue la déclinaison sportive à l’école. Les autres fédérations ont un projet sportif, avec désormais une déclinaison éducative. L’Usep, c’est l’inverse, ce qui donne un sens très particulier à son action, et explique certaines démarches ou positions de ses militants.
Ce qui distingue l’Usep, c’est aussi son public : elle est la seule à s’occuper exclusivement des enfants de 3 à 11 ans, ce qui l’a amenée à développer une expertise considérable, avec des productions pédagogiques, nationales, départementales ou académiques, tout à fait remarquables.
L’ambition démocratique, qui est au cœur du projet de l’Usep, l’invite aussi à être présente dans chaque école. Or ce projet n’est pas totalement abouti, en raison de l’organisation même de l’Usep, qui repose sur le militantisme et le volontariat. C’est ce qui la distingue de l’UNSS, où le service des enseignants d’EPS inclut l’animation de l’association sportive.
Dès lors que l’association Usep repose sur la base du volontariat des intervenants, on se trouve face à une très grande hétérogénéité : d’un département à l’autre, le taux de licenciés peut varier de 2 % à 60 %. Pour une même politique nationale, les dynamiques territoriales sont donc très variables.
La spécificité de l’Usep est à la fois une force et une faiblesse. Structurellement, a-t-elle les moyens de l’ambition d’une association dans chaque école ? D’un intervenant dans chaque association ? Aujourd’hui, ce n’est pas le cas.
Avez-vous envisagé avec la présidente de l’Usep la façon d’y remédier ?
Les réponses peuvent être recherchées à la fois au sein de l’Éducation nationale et auprès des autres partenaires du sport scolaire que sont les collectivités locales. Du côté de l’Éducation nationale, la réflexion est ouverte, la question est sur la table du ministre. Quant aux solutions offertes par les collectivités locales, elles existent. Quand on compare les départements qui ne comptent pas plus de 5 % de licenciés Usep et ceux qui s’approchent ou dépassent les 50 %, on s’aperçoit en effet que, ce qui change, c’est l’engagement des communes et des départements en soutien de l’action des enseignants du premier degré. L’action des collectivités est elle-même hétérogène, et l’État peut sans doute contribuer à stimuler et accompagner les initiatives. C’est une réflexion d’ensemble, et elle est en cours.