Deuxième volet de notre enquête sur les comités Usep qui se sont les plus développés depuis 2014, comme le Calvados, la Haute-Marne et l’Aisne. Trois expériences qui interrogent le principe « une école, une association ».
Offensif, le Calvados !
En trois ans, l’Usep Calvados a plus que doublé ses effectifs. La recette : développement des rencontres en temps scolaire, nouvelle offre tarifaire et petits arrangements associatifs, explique la déléguée, Frédérique Venturelli.
Offre tarifaire. « La première explication de notre progression réside probablement dans notre nouvelle offre tarifaire. La première année de l’affiliation d’une nouvelle association, les licences sont à moitié prix : nous tablons sur le fait qu’une fois que les écoles ont goûté à l’Usep, elles y restent ! Nous conservons également le principe des licences facturées à 50% pour les écoles situées en Rep (Réseaux d’éducation prioritaire) : c’est là un choix ″politique″ car nous estimons que nous devons être particulièrement présents dans ces quartiers. La licence est ainsi à 2,65 € (contre 5,30 € en cycle 2 et cycle 3) : autant dire qu’une fois déduite la part nationale, il ne nous reste pas grand-chose. Mais nous considérons cela comme un investissement, comme du développement. »
Temps et hors temps scolaire. « Nos rencontres hors temps scolaire du mercredi ont diminué de moitié (de 39 à 22), mais n’ont pas disparu : il s’agit de grands tournois de sports collectifs, d’activités de pleine nature, du P’tit Tour ou de notre grande manifestation Useplages de juin. Parallèlement, nous avons doublé celles en temps scolaire (de 31 à 60). L’inversion s’est opérée en 2014-2015, mais nous songions depuis plusieurs années à faire évoluer notre modèle. »
Moyens humains. « Michaël Cardinne, éducateur Usep pour 70% de son temps de travail, est très présent sur les rencontres. Il travaille en lien étroit avec les conseillers pédagogiques de circonscription EPS sur les trois quarts du territoire. Or les nouveaux CPC sont souvent généralistes : l’EPS n’est pas forcément leur compétence première et ils apprécient de pouvoir s’appuyer sur le savoir-faire Usep. En outre, nous avons au sein du comité directeur un enseignant et un CPC en retraite, qui donnent volontiers un coup de main. Par ailleurs, la conseillère pédagogique départementale (et toute nouvelle présidente du comité Usep), Pascale Hourquet, est présente sur toutes les grosses organisations. »
Écoles rattachées. « Nous tolérons, au moins dans un premier temps, que des écoles dérogent au principe « une école une association ». Sur trois secteurs, à Vire, à Mézidon-Canon et à Creully, nous avons accepté que des écoles voisines se rattachent à l’association d’école. Bien évidemment, un tel accommodement n’a pas vocation à être généralisé. Mais il répond au souhait de toucher le plus grand nombre d’enfants. »
Stage Usep. « Chaque année, nous organisons début juin, sur deux jours et pour 12 enseignants, un stage Usep en temps scolaire (et sur lequel se greffent généralement deux ou trois animateurs périscolaires). Il s’agit d’enseignants qui souhaitent s’engager au sein d’une AS Usep ou, mieux encore, en créer une. »
Propos recueillis par Philippe Brenot
Plus de 2200 licenciés enfants
Au 31 août 2016, le comité Usep du Calvados comptait 1922 licenciés enfants, contre 973 deux ans plus tôt, soit une augmentation de 98%. Une progression s’est poursuivie sur l’année en cours puisque le comité réunissait fin mai 2215 licenciés enfants. Parallèlement, toujours entre 2014 et 2016, le nombre de rencontre en temps scolaire est passé de 31 à 60, tandis que celui des rencontres hors temps scolaire était réduit de 39 à 22.
La Haute-Marne à la reconquête du temps scolaire
L’Usep Haute-Marne a longtemps organisé des rencontres pour des enfants non licenciés. La remise en cause de ce fonctionnement atypique, couplée à une offre renforcée, a fait exploser les effectifs, explique la déléguée départementale, Marie Van de Wiele.
Marie Van de Wiele, comment le comité Usep de Haute-Marne a-t-il fait pour passer, entre 2014 et 2016, de 2417 à 4540 licenciés enfants ?
Oh, mais nous partions de plus loin encore ! En 2013, au début de la précédente mandature, nous n’avions officiellement que 274 licenciés, participant à des rencontres hors temps scolaire. Il s’agissait d’une pratique hebdomadaire, avec des rencontres organisées parfois sur toute la journée du mercredi, dans les différents secteurs ou au niveau départemental. Cependant, l’Usep, présente au sein de l’équipe EPS, intervenait en renfort des conseillers pédagogiques sur des rencontres qui, elles, touchaient près de 8 000 enfants, de la grande section de maternelle au CM2. Nous avons alors exigé que pour participer à toute rencontre sportive organisée avec l’Usep, et portant désormais son label, tous les enfants devraient être licenciés.
Comment l’avez-vous justifié ?
Nous avons sensibilité les collègues à la prise de licence, tout en développant notre offre. Quand les nouveaux rythmes scolaires ont été introduits puis généralisés, nous avons maintenu nos rencontres hors temps scolaire le mercredi après-midi, et étoffé le calendrier de celles en temps scolaire (1). Nous avons aussi profité de l’édition 2013 du P’tit Tour pour exiger que tous les enfants qui y participaient soient licenciés.
Le nombre d’associations Usep a-t-il augmenté dans les mêmes proportions ?
Non, au contraire. Le comité n’en compte plus que neuf, car ce sont désormais des associations de secteur auxquelles les écoles adhèrent directement, ce qui les exonère de toute démarche administrative. Mais c’était déjà le cas avant 2013 : la seule différence était que l’enfant y adhérait à titre individuel, alors qu’aujourd’hui c’est toute une classe. Mais il faut insister sur le fait que chaque enfant reçoit une licence nominative.
Considérant qu’il y a 12 000 écoliers en Haute-Marne, pensez-vous pouvoir encore vous développer ?
Non, je ne crois pas. Je partage mon temps de déléguée départementale entre l’Usep et l’Ufolep, même si je suis épaulée à l’Usep par un animateur sportif en emploi d’avenir. Pour un département rural et très étendu comme le nôtre, 4 500 licenciés me semble un plafond. À moyens égaux, difficile de faire mieux. Mais il peut y avoir de bonnes surprises !
Propos recueillis par Philippe Brenot
(1) Soit, pour l’année 2016, 36 rencontres hors temps scolaire et 154 rencontres en temps scolaire.
Ces comités qui interrogent la structuration de l’Usep
Faut-il accepter des accommodements au principe « une école, une association » au nom du développement de la pratique sportive scolaire ?
Le développement des associations Usep passe-t-il par certaines évolutions statutaires ? C’est la question que posent les témoignages des comités de l’Aisne et de la Haute-Marne, où le sport scolaire du premier degré affiche aujourd’hui une belle vitalité.
Nous considérons aujourd’hui l’école comme le périmètre minimum de l’association sportive Usep. En effet, le fonctionnement de l’AS repose sur la mise en œuvre d’un projet sportif associatif propre à chaque école et auquel contribuent les enfants qui en sont partie prenante.
Pour faire vivre ce projet d’AS Usep, il est donc indispensable de créer les conditions de l’échange, de la concertation, de l’implication des enfants pour que la vie associative soit vécue de façon éducative et non pas comme une contrainte supplémentaire.
Deux problématiques contradictoires
Une fois ce principe de base posé, nous devons tenir compte des principes de réalité, ce qui nous invite à dégager deux problématiques presque contradictoires.
D’un côté, créer une AS Usep lorsqu’on exerce en classe unique ou lorsqu’on est isolé géographiquement peut paraître insuffisant pour s’inscrire dans une réelle dynamique associative. Intégrer une AS de secteur peut alors offrir la possibilité d’un fonctionnement plus collaboratif, d’une mutualisation de matériel, d’une forme de convivialité retrouvée.
De l’autre, faire partie d’une AS de secteur pourrait rendre l’AS d’école transparente au point que le fonctionnement associatif, relégué à une autre échelle perdrait de sa réalité dans le quotidien de l’école, de la classe.
Garantir la mise en œuvre du projet associatif
Mais si l’on considère que l’AS Usep est le lieu où s’exerce la concertation, la coopération et le travail de conception du projet sportif associatif, il est préférable que cet apprentissage se vive avec d’autres. Dans l’Aisne par exemple, le regroupement en association de secteur prend tout son sens puisqu’il s’agit de rompre l’isolement et de favoriser un fonctionnement associatif qui privilégie les rencontres entre enfants et entre adultes.
Pour autant, si l’on envisage qu’un département pourrait fonctionner avec une dizaine d’associations de secteur Usep regroupant jusqu’à 4 à 5000 enfants licenciés, il faudrait alors trouver un cadre ou un dispositif qui garantisse la mise en œuvre du projet sportif associatif, moteur de l’activité Usep, au plus près des enfants, et donc au plus près de la plus petite unité associative : l’école, la classe.
Une réponse statutaire
L’ambition légitime de l’Usep est de se développer. Alors, pour s’en donner les moyens, faut-il toujours privilégier l’AS d’école ou faire évoluer nos statuts afin d’identifier de façon officielle une association de secteur qui agirait sur un périmètre plus large, lequel reste d’ailleurs à définir ? Le comité directeur a décidé de s’emparer de cette problématique et la commission nationale vie statutaire a été chargée d’étudier quelles réponses statutaires apporter à la question posée.
En parallèle, la question de l’affiliation des adultes doit également être posée pour répondre à cette double problématique : élargir notre réseau d’adultes tout en réduisant l’investissement financier qu’il réclame à chacun d’eux.
Véronique Moreira, présidente de l’Usep