Enseignante à l’école Les Bruyères de Bruguières, au nord de Toulouse (Haute-Garonne), Delphine Bruel, 46 ans, est membre depuis 2002 d’une association impliquant largement les parents d’élèves. Un dynamisme aujourd’hui entravé par les évolutions territoriales et les freins à l’engagement des enseignants.
Delphine Bruel, comment devient-on animatrice Usep ?
En étant nommée dans une école où une association était active depuis 1987. Au début, j’ai pensé : je vais tenter l’aventure un an, et on verra. C’était en 2002, et aujourd’hui je préside l’association.
Le sport scolaire, ça vous parlait ?
J’adhérais au concept : faire du sport sans pression, sans compétition, en découvrant de nouvelles activités. Moi-même, je ne suis pas une très grande sportive. Même si, enfant, à chacun de nos nombreux déménagements, mon père, gymnaste de niveau national, m’inscrivait en club avant même de m’inscrire à l’école ! Ce qui a favorisé mon investissement à l’Usep, et celui de mes jeunes collègues, c’est aussi que nos propres enfants étaient scolarisés dans l’établissement. Mon fils et ma fille ont débuté l’Usep en CP et, durant toutes ces années, les rencontres du mercredi ont été pour moi des moments privilégiés. De leur côté, mes enfants étaient ravis de pratiquer avec leurs copains et copines, et ont conservé une activité sportive régulière. Arno, 20 ans, est maître-nageur sauveteur l’été et Claire, 18 ans, continue la danse.
Tous les enfants de l’école sont-ils licenciés ?
Non, car notre activité se déploie hors temps scolaire : cette année, les CP-CE1 participeront à 5 rencontres, et les CE2-CM2 à 7. Sur 375 élèves, 110 sont adhérents, plus 30 adultes, parents et enseignants.
Et, hors du calendrier départemental, comment vit l’association ?
Nous organisons au sein de l’école une grande rencontre et un cross, plus une sortie annuelle, sur proposition des enfants, qui participent à nos comités directeurs par l’intermédiaire des délégués Usep élus dans chaque classe. C’est une journée à la mer, au ski, à la patinoire, ou cette année dans un parc aventure. La journée est organisée et encadrée par les enseignants et les parents. Les enfants, eux, trouvent le financement, généralement grâce à une tombola. En janvier, nous tirons aussi les rois avec toute l’école et, en fin d’année, nous organisons un repas, avec des jeux animés par les délégués enfants. C’est convivial et ça permet aux parents de se connaître.
L’Usep participe au projet d’école ?
Elle y figure bien évidemment, notamment à travers deux grands axes : la prise d’initiative des enfants et le développement d’une pratique sportive cultivant les notions de fair-play et de respect des règles.
L’association a-t-elle changé en 20 ans ?
Elle a subi l’évolution de son environnement. À l’image de toute l’agglomération toulousaine, la commune de Bruguières a vu croitre son nombre d’habitants de 3 500 à plus de 5 500. Parallèlement, l’école est passée de 11 à 15 classes – on prévoit un deuxième groupe scolaire – et localement l’offre associative s’est développée : désormais, les enfants ont le choix entre le foot, la musique, la danse… Nous nous retrouvons malgré nous en concurrence avec les clubs locaux, avec une perte de licenciés sensible en cycle 3.
J’imagine que votre cas n’est pas unique…
Non, et malheureusement plusieurs associations Usep autour de nous ont cessé leur activité. Parfois, tout reposait sur une seule personne, qui a été mutée ou est partie en retraite. Le retour à la semaine de 4 jours de certaines écoles a également dissuadé certains enseignants de participer aux rencontres du mercredi après-midi. Des mercredis où, par ailleurs, des animations pédagogiques se chevauchent parfois avec les rencontres Usep.
Comment réussissez-vous malgré tout à conserver votre dynamique associative ?
Il n’est pas facile de motiver les troupes quand les professeurs des écoles sont sollicités de toute part : réunions, projets, tâches administratives… Certains disent : « Tant pis, je ne vais pas me rajouter un truc en plus. » À une époque, presque tous les enseignants de l’école étaient adhérents à l’Usep ; aujourd’hui, c’est un sur deux. Et encore, en Haute-Garonne, à la différence d’autres départements, les professeurs des écoles reçoivent des indemnités péri-éducatives de l’Éducation nationale pour encadrer les mercredis après-midi. Même si elles ont été réduites de moitié, c’est à la fois une reconnaissance et un appoint financier. Néanmoins, je ressens un essoufflement au niveau départemental.
Comment y remédier ?
En dépit de l’investissement de notre délégué, à moyen terme je crains que les rencontres du mercredi ne disparaissent. Elles seront alors transférées sur le temps scolaire : c’est ce qui se développe le plus aujourd’hui. Nous aussi finirons peut-être par y venir.