L’Éducation nationale a lancé avec l’appui de Paris 2024 un « appel à manifestation d’intérêt d’activité physique quotidienne à l’école ». Pourquoi cette initiative ? En quoi consiste précisément cette recommandation ? Pourquoi l’Usep la relaie-t-elle ? Les explications de la présidente Véronique Moreira.
Véronique Moreira, les professeurs des écoles sont sollicités aujourd’hui pour veiller à ce que leurs élèves aient au moins 30 minutes d’activité physique quotidienne par jour. D’où vient cette recommandation relayée sur les réseaux sociaux à travers le slogan #Bougez30minutes ?
Il repose sur un constat de santé publique préoccupant : les enfants se bougent de moins en moins, y compris pendant la récréation ou pour se rendre à l’école. Cette sédentarité se traduit dans les courbes de l’épidémie d’obésité et va de pair avec l’augmentation du temps passé devant les écrans.
Ce constat n’est pas neuf…
Non, cela fait des années que l’Onaps, l’Observatoire national de l’activité physique et de la sédentarité, martèle ce message, et que la Fédération française de cardiologie rappelle qu’en vingt ans les collégiens ont perdu un quart de leurs capacités cardiovasculaires. Différents acteurs, dont l’Usep, militent aussi pour le respect des trois heures hebdomadaires d’EPS à l’école, complétées par les activités Usep. Mais cette situation a été considérablement aggravée depuis un an par le confinement et les mesures sanitaires venues aussi restreindre drastiquement le sport scolaire et la pratique en club. Dans ce contexte, l’inquiétude des médecins résonne plus fort encore. Elle est également partagée par le comité d’organisation de Paris 2024, qui a fait du développement de la pratique physique et sportive la base de l’Héritage qu’il souhaite laisser. C’est ce qui a conduit le ministère de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports à lancer un appel à manifestation d’intérêt pour 30 minutes d’activité physique quotidienne à l’école.
Est-ce une nouvelle norme pour les horaires d’EPS ?
Non, et il faut éviter toute confusion sur ce point. Comme le stipule cet appel, « il y a nécessité d’assurer 3 heures d’EPS à l’école élémentaire ». Ces 30 minutes ne doivent aucunement se substituer à celle-ci et il est préconisé de les proposer « les jours où l’enseignement de l’EPS n’est pas programmé ». En outre, cet appel repose sur le volontariat des enseignants. Ce n’est pas une injonction mais une incitation, certes fortement relayée auprès des écoles par les conseillers pédagogiques EPS. Ce n’est donc ni de l’EPS, ni du sport scolaire, cela vient en plus et peut être fractionné sur la journée : 10 mn de marche à pied ou de vélo pour se rendre à l’école, 10 autres à courir et sauter à la récréation, etc. C’est aussi prendre l’escalier plutôt que l’ascenseur et ne pas rester toujours collé à sa chaise. À cet égard, si ce message permet d’interroger la place du corps de l’enfant à l’école, tant mieux !
Ce message risque malgré tout de brouiller celui de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui recommande pour les 5-17 ans « au moins 60 minutes par jour d’activité physique d’intensité modérée à soutenue »…
On peut en effet se poser la question de la demi-heure restante, à effectuer en dehors de l’école et dont le respect incomberait alors aux familles.
L’Usep a-t-elle été associée à cet appel pour 30 minutes d’activité physique quotidienne ?
Oui. Elle figure même au premier rang des acteurs impliqués et ses outils sont proposés en téléchargement, qu’il s’agisse de son document « Un projet Usep au service du Parcours éducatif de santé » ou de ressources immédiatement mobilisables comme son recueil de jeux traditionnels ou les défis-récré lancés avec la Fédération française d’athlétisme et principalement imaginés par les enfants eux-mêmes.
Deux outils qui encouragent l’autonomie de l’enfant…
Oui, parce que celle-ci est au cœur du concept de L’Attitude Santé que l’Usep travaille depuis 2006 avec l’Onaps pour lutter contre la sédentarité. Au lieu d’un discours convenu sur le mode « le sport c’est bon pour la santé », mieux vaut permettre aux enfants de repérer leurs pratiques et de questionner leurs comportements, dans l’échange entre pairs. C’est ce que visent nos réglettes du plaisir et de l’effort ou le compteur d’activités : faire prendre conscience à l’enfant, à travers ses ressentis, de l’apport des activités physiques et sportives. L’Attitude santé repose sur la conviction que ces émotions positives l’inciteront à adopter et conserver ensuite des habitudes de pratique.
C’est aussi pourquoi nous insistons sur le fait que ces 30 minutes doivent se situer hors de tout cycle d’apprentissage, sans progression ni évaluation, et se passer le plus possible du recours à l’adulte. Celui-ci doit avant tout créer les conditions permettant à l’enfant de s’auto-organiser et de bouger de manière naturelle et spontanée. Pour autant, il ne suffit pas de lâcher ses élèves dans la cour en leur disant de jouer à chat… Et j’insiste, ces 30 minutes ne doivent pas se substituer à l’EPS.
Et quel rôle peut jouer l’association Usep ?
Ces 30 minutes d’activité physique quotidienne peuvent devenir partie prenante de son projet, par exemple sous la forme d’un pédibus ou d’un vélobus, d’un concours de défis-récré ou d’une initiative pour aider les enfants à s’approprier des jeux sportifs. L’association Usep d’école peut alors contribuer à donner du sens à ce message.
- 30 minutes d’activité physique quotidienne : Tony Estanguet visite une école Usep à Nantes
- 30 minutes d’activité physique quotidienne : présentation
- Un projet Usep au service du Parcours éducatif de santé
- L’Attitude santé : les outils pour les cycles 1, 2 et 3
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